L'Inde renforce sa loi contre la sérophobie

L'Inde renforce sa loi contre la sérophobie

 

Par emy-seronet

Créé 7 mai 2012 - 17:08

 


Injures, expulsions, licenciements… Le "Times of India" du 8 avril 2012 le confirme : les séropositifs qui vivent en Inde sont confrontés à une persécution grandissante dans la sphère privée, professionnelle et publique. Le gouvernement indien a récemment déposé un projet de loi visant à renforcer la protection de ces personnes, notamment en pénalisant sévèrement les actes et propos sérophobes.

 

Il s’agit d’un amendement, mais qui pourrait constituer un tournant. Un amendement qui viendrait  compléter la loi indienne sur la prévention et la prise en charge du VIH/sida (HIV-AIDS Prevention and Control Bill). Il instaurerait la mise en place d'un ministère spécifique fondé sur le fonctionnement de la National Aids Control Organization (NACO) (1) qui gèrerait, entre autres, les centres de dépistage, les banques de sang, et veillerait à l'application des meilleurs protocoles thérapeutiques. Il interdirait aux employeurs d'exiger un test de dépistage des personnes qui postulent dans leur entreprise, sanctionnerait les structures de santé, établissements scolaires et autres professionnels qui exigent la même chose, sanctionnerait les soignants qui rompent le secret médical et les personnes qui dévoilent l'identité d'une personne séropositive sans son consentement.

 

L'article du "Times of India" donne d'autres exemples : les séropositifs ne pourront plus être licenciés sans un ordre médical qui confirme l'existence d'un risque de transmission du virus, ceux qui se sont vu refuser l'entrée d'un hôtel, d'un restaurant, ceux à qui on a refusé de vendre ou de louer un bien immobilier et tous ceux qui s'estiment victimes d'une discrimination sérophobe pourront solliciter un médiateur et entamer, si besoin, une procédure judiciaire spécifique. "La présence d'un médiateur dans chaque province, chargé d'évaluer la discrimination en question, permettrait d'éviter de longues et lourdes procédures judiciaires", précise le journal. "Une des clauses [de cet amendement] prévoit une peine de trois mois à deux ans d'emprisonnement, voire une amende de 100 000 roupies (un peu moins de 1 500 euros), pour les auteurs de propos sérophobes, oraux ou écrits, et pour ceux qui diffusent toute forme de propagande hostile aux personnes séropositives". Des mesures sévères qui se veulent avant tout "dissuasives".

 

Respect des droits humains, pédagogie et éducation thérapeutique ensuite : la nouvelle législation mettrait fin au dépistage forcé, pratiqué à l'insu et/ou sans le consentement de la personne, aux mises sous traitement forcées, et obligerait l'équipe médicale à informer la personne des bénéfices et des risques liés à ce traitement. Elle sanctionnerait les soignants qui rompent le secret médical mais leur laisserait la liberté d'informer le partenaire d'une personne séropositive s'ils l'estiment nécessaire et les autoriserait à ne pas informer ce partenaire si la personne séropositive est une personne vulnérable qui risque d'être abandonnée ou battue. L'amendement prévoit, par ailleurs, l'ouverture de maisons "refuge" qui accueilleraient les personnes séropositives ayant été expulsées de leur domicile, ce qui aiderait un grand nombre de femmes, majeures comme mineures, en instance de divorce.

 

L'Organisation mondiale de la santé estimait en 2007 à 2,5 millions le nombre de personnes vivant avec le VIH/sida en Inde. Alors que plusieurs associations françaises, dont AIDES, plaident depuis longtemps pour que les injures, agressions et discriminations à caractère sérophobe soient jugées avec "circonstance aggravante" au même titre que celles liées au sexe, l'orientation sexuelle ou l'origine ethnique, l'Inde se dessine comme le pays qui pourrait montrer l'exemple. L'article du "Times of India" ne précise pas si ces mesures seront accompagnées d'un renforcement des campagnes d'information et de prévention. Punir sans expliquer pourquoi risquerait de s'avérer peu efficace sur le long terme.

 


(1) La National Aids Control Organization (NACO) est un département du ministère indien de la Santé et de la famille. Fondé en 1992 avec le soutien de l'Organisation mondiale de la santé, il gère les  programmes de prévention et de prise en charge du VIH/sida sur tout le pays.

 


Article disponible à l’adresse suivante :

http://www.seronet.info/article/l-inde-renforce-sa-loi-contre-la-serophobie-49292
 



11/05/2012
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